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Après trois années de restauration, la Bibliothèque patrimoniale Fesch rouvre enfin ses portes au public. Cette réouverture marque l’aboutissement d’un vaste projet de réhabilitation, mené avec rigueur et passion. Ce chantier d’envergure a pu voir le jour grâce à la Mission Bern « Patrimoine en péril » et au soutien financier du Loto du Patrimoine.
Stéphane Sbraggia, maire d’Ajaccio et président de la Communauté d’Agglomération du Pays Ajaccien, et Simone Guerrini, adjointe à la Culture et au patrimoine, accompagnés d’élus et des nombreux partenaires de l’opération, ont célébré la renaissance de ce haut lieu du patrimoine ajaccien le mardi 13 mai, lors d’une cérémonie d’inauguration solennelle.
La création de la Bibliothèque Fesch tire son origine du projet du cardinal Joseph Fesch, oncle de Napoléon Bonaparte, qui souhaitait doter sa ville natale, Ajaccio, d’un grand établissement culturel, un Institut des Arts et des Sciences destiné à éduquer les jeunes Corses. La construction du Palais Fesch débute en 1828, mais le cardinal meurt avant de voir son projet aboutir.
En 1855, la Ville d’Ajaccio décide d’aménager une bibliothèque dans l’aile nord du palais. Les travaux sont menés parallèlement à ceux de l’établissement supérieur où se loge l’actuel musée Fesch. Le projet s’achève en 1865 et la bibliothèque est inaugurée en 1868, sous le Second Empire.
Dès l’origine, cette bibliothèque abrite un riche fonds ancien, constitué de milliers d’ouvrages rares et précieux. Ce fonds a été constitué à partir des confiscations révolutionnaires avec une sélection de 12 627 livres envoyés en 1801 par Lucien Bonaparte et André-François Miot à Ajaccio, à la demande de Napoléon Bonaparte, alors Premier consul, donnant naissance à la « Bibliothèque nationale du Liamone ». Elle est enrichie au fil des années grâce aux dons et legs, en particulier celui de Joseph Fesch, oncle maternel de Napoléon. Ce patrimoine exceptionnel fait rapidement de la Bibliothèque Fesch un lieu de savoir unique en Corse.
L’architecture intérieure est remarquable : la grande salle de lecture, au mobilier en châtaignier conçu par l’architecte Cazeneuve, s’inspire de la Bibliothèque Mazarine à Paris. Le plancher en pin lariccio, les rayonnages boisés, ainsi que l’escalier d’honneur de Jérôme Maglioli confèrent au lieu une atmosphère solennelle.
En 1986, l’ensemble est classé au titre des Monuments historiques, y compris les boiseries, le mobilier et les collections. Malgré son importance, la bibliothèque subit peu à peu les affres du temps et de conditions inadéquates pour la conservation des ouvrages.
Face à l’affluence (15000 visiteurs et 1600 lecteurs en 2019) et à ces enjeux, la Ville d’Ajaccio engage un vaste programme de rénovation, retenu en 2019 au titre de la Mission Bern – Patrimoine en péril, bénéficiant d’un financement du Loto du Patrimoine.
Ce projet a été sélectionné parmi 865 dossiers. A la clé, un financement de 500 000 € accordé par la Fondation du Patrimoine et la Française des Jeux.
RETROUVER LA SPLENDEUR ORIGINELLE DE L’ÉTABLISSEMENT
Lancée en décembre 2023, la restauration de la Bibliothèque patrimoniale Fesch a permis de restituer tout le cachet historique du lieu, tout en mettant en valeur ses collections exceptionnelles.
Au cœur de ce chantier, qui figure parmi les grands projets de la mandature : la volonté d’assurer la conservation optimale du fonds anciens et de favoriser l’étude et la connaissance des collections.
En amont des travaux, une vaste opération de déménagement de plus de 18 000 ouvrages a été menée par l’équipe de la bibliothèque, vers les réserves, reconfigurées pour l’occasion, et l’ancienne médiathèque Sampiero. Cette étape a permis un récolement précis et un dépoussiérage complet des collections.
La maîtrise d’œuvre a été assurée par l’agence d’architecture Fabrica Traceorum, avec le concours de la direction générale des services technique de la Ville à toutes les étapes du chantier.
Les travaux ont porté sur la refonte du système de gestion et de traitement de l’air et la mise aux normes des installations électriques et de sécurité. En parallèle, les éléments patrimoniaux de la salle de lecture (grande table centrale en châtaignier, parquet en pin lariccio, boiseries) ont été restaurés et mis en valeur. De même, le hall d’entrée et l’escalier d’honneur ont bénéficié d’une restauration, révélant les éléments de décors peints. Les gardiens de ce haut lieu culturel, deux lions de plâtre, moulés sur les originaux du sculpteur Canova, qui figurent sur le tombeau du pape Clément XIII à Saint-Pierre de Rome, ont été nettoyés, avant une restauration fondamentale à venir.
Ce chantier a nécessité l’intervention de nombreux corps de métiers de façon simultanée :
menuisiers, électriciens, maçons, restaurateurs, ferronniers…
Afin d’offrir aux visiteurs un confort optimal, les aménagements contemporains ont été intégrés :
nouvel éclairage, signalétique repensée, connexion Wi-Fi, pour un accueil à la hauteur des attentes des étudiants et chercheurs fréquentant ce lieu emblématique du patrimoine ajaccien, ainsi que les visiteurs de passage.
| Ces travaux ont été réalisés avec le soutien financier de l’État (DRAC), la Collectivité de Corse, la Fondation du Patrimoine et la Française des jeux, le mécénat de Dassault Histoire et Patrimoine et de nombreux mécènes privés. Le coût s’élève à 1,8 M€. En détails : État (DRAC) : 590 569 € Collectivité de Corse : 425 000 € Mécénats : Mission Bern/Fondation du patrimoine : 500 000 € Dotation Dassault Histoire et patrimoine : 200 000 € + D’autres mécènes privés, via l’appel au don sur la plateforme de la Fondation du patrimoine. |
S’ENGAGER DANS UNE VALORISATION CULTURELLE ET PATRIMONIALE
La réouverture de la Bibliothèque patrimoniale Fesch s’inscrit dans une démarche de valorisation globale du Palais Fesch, qui implique à la fois la bibliothèque, le musée et la chapelle impériale, dans le but d’offrir au public un parcours culturel et patrimonial cohérent et enrichi.
Dès sa réouverture, la bibliothèque sera animée par une programmation culturelle ambitieuse, comprenant visites guidées, conférences, expositions temporaires et possibilités de privatisation des espaces patrimoniaux, comme le hall d’entrée ou la grande salle de lecture.
Le partenariat scientifique engagé avec Sorbonne Université a été maintenu tout au long des travaux. Il donnera lieu, en 2026, à l’organisation d’un colloque scientifique, avec une restitution complète des recherches menées sur le fonds ancien.
À l’occasion de l’inauguration, a débuté une exposition présentant les plus belles restaurations de livres du fonds ancien, qui mettra en lumière les récentes campagnes de restauration réalisées par Simone Martini. Une exposition virtuelle, accessible via le site internet de la bibliothèque patrimoniale, offrira un complément numérique pour découvrir les coulisses du chantier de rénovation.
Grâce à la mise en place d’un meuble vitrine dans la salle de lecture, une présentation d’un ouvrage emblématique du fonds de la bibliothèque sera proposée au public chaque mois.
De plus, une exposition sur la figure de Pascal Paoli se prépare également, pour la fin de l’année, dans le cadre du tricentenaire de sa naissance. Elle mettra en valeur les archives de Dorothy Carrington, qui a travaillé sur cette grande figure historique. Lady Rose figure parmi les grands donateurs de la Bibliothèque Fesch.
Par ailleurs, une réflexion est en cours sur l’avenir de l’ancienne médiathèque Sampiero, aujourd’hui fermée, afin de prolonger la dynamique de valorisation du patrimoine ajaccien.
Enfin, pour révéler pleinement le joyau du Palais Fesch, à savoir la Chapelle impériale, des travaux de jonction entre cette première et le Musée seront engagés. Ce projet vise à offrir aux visiteurs une expérience unifiée trois de ces espaces patrimoniaux majeurs d’Ajaccio, dans une approche culturelle et historique globale : Chapelle, Musée et Bibliothèque.
UN FONDS ANCIEN D’UNE VALEUR INESTIMABLE À PRÉSERVER ET VALORISER
Ces travaux de restauration ont également permis d’assurer pleinement la conservation des collections anciennes de la bibliothèque tout en améliorant leur valorisation auprès du public. Les 18 000 ouvrages installés sur les rayonnages trouveront désormais un écrin plus sûr avec des conditions optimales de conservation.
Depuis 2018, la direction de la lecture publique a entrepris une campagne annuelle de restauration des ouvrages les plus précieux.
Pour rappel, créé à l’initiative de Napoléon Bonaparte, le fonds de la Bibliothèque Fesch se compose d’ouvrages issus des confiscations révolutionnaires (12 627 ouvrages qui couvrent tous les domaines de la connaissance à cette époque), des couvents corses, de la collection romaine du cardinal Fesch, oncle de Napoléon, et d’autres donateurs tels que Marc-Aurèle Marchi. Les collections anciennes comptent de nombreuses éditions rares, des ouvrages d’éditeurs prestigieux et plusieurs centaines de reliures armoriées.
Parmi les livres et les manuscrits, dont les plus anciens datent du XIVe siècle, le fonds recense 29 incunables imprimés entre 1455 et 1500. Parmi eux : la « Cité de Dieu » de Saint-Augustin, «Liber Chronicarum» ou «La Chronique de Nuremberg» de Hartman Schedel, datant de 1493.
Sans oublier d’autres documents précieux, parmi lesquels des lettres de la famille impériale, la biographie de Jules César par Napoléon III et dédicacée de sa main à l’attention de la bibliothèque, ou encore, le «Thésaurum Hyeroglyphicorum », un traité d’égyptologie daté de 1610, dont 8 exemplaires seulement sont recensés dans le monde et dont l’exemplaire de la Bibliothèque patrimoniale ajaccienne aurait appartenu à Colbert, ministre de Louis XIV.
EXPOSITION TEMPORAIRE LA BIBLIOTHÈQUE FESCH : HISTOIRES DE RESTAURATION DU 12 MAI AU 27 JUIN
Sur place et en ligne
À l’occasion de la réouverture de la Bibliothèque patrimoniale Fesch, la direction de la lecture publique de la Ville d’Ajaccio a choisi de présenter une exposition-événement composée de deu volets : le premier présentant les plus belles restaurations de livres du fonds ancien, sous le titre « Les collections Fesch font peau neuve », du 12 mai au 27 juin, et le second portant sur la restauration de la bibliothèque, visible en ligne, sous la forme d’une exposition numérique depuis le site : www.bibliothequefesch.ajaccio.fr.
Pendant la fermeture de la Bibliothèque, la direction de la lecture publique de la Ville d’Ajaccio a mis l’accent sur la politique menée en faveur de la restauration de ses collections d’ouvrages anciens. Ce temps a donc été consacré notamment à la restauration de l’intégralité de la collection d’incunables, qui a nécessité de mener des opérations délicates pour préserver l’intégrité de ces ouvrages précieux. En effet, leur l’état sanitaire demandait une intervention urgente.
Cette première exposition s’attachera donc à présenter au public la virtuosité du travail de restauration assuré par Simone Martini, qui intervient à la Bibliothèque Fesch depuis 2018. Cet artisan a été choisi pour sa spécialisation et ses compétences en matière de restauration des reliures médiévales, ainsi que son expérience auprès des musées nationaux italiens et de bibliothèques patrimoniales telles que Florence et Sienne.
Parmi les ouvrages qui seront visibles, on pourra admirer l’un des incunables le plus remarquables du fonds de la Bibliothèque patrimoniale Fesch, la « Chronique de Nuremberg », datée de 1493.
Pour sa restauration, la Ville d’Ajaccio a bénéficié du soutien logistique et financier de la Fondation du Patrimoine et de généreux mécènes corses.
Le public découvrira également d’autres ouvrages qui ne sont pas recensés comme incunables mais dont la valeur scientifique n’est plus à démontrer : un manuscrit « De arte Rhetorica » du fonds Cardinal Fesch ; un ouvrage du XVIIe siècle sur l’anatomie, « Theatrum anatomicum » ; un traité de navigation du XVIIe siècle, « Le Flambeau de la navigation », et un ouvrage sur les « Statuti civili e criminali del commune di Bonifacio », de Giovan’Battista Marzolaccio.
En tout, c’est une sélection de 11 livres du XVe au XVIIIe siècle qui seront visibles pendant un mois. L’exposition mettra en exergue le travail de restauration effectué sur chacun de ces ouvrages.
Témoignant ainsi de l’importance de préserver et transmettre ces collections aux générations futures.